❓ Trottinette free-floating (Lime, Dott) : qui est responsable, le loueur ou l’usager ?
1) Quelles règles de base s’appliquent à l’usager (EDPM) ?
2) Le loueur (Lime, Dott) fournit-il une assurance ?
3) Si je blesse un piéton ou abîme une voiture, qui paie ?
4) Et mes propres blessures (usager) : suis-je couvert·e ?
5) Détérioration ou vol de la trottinette : qui est responsable ?
6) Quelles sont les obligations du loueur (opérateur) ?
7) Quelles sont les obligations de l’usager ?
8) Plafonds et exclusions d’assurance : à quoi m’attendre ?
9) Quelles démarches après un accident ?
10) Villes avec règles spécifiques ?
Trottinette free-floating (Lime, Dott, Tier…) : qui est responsable en cas d’accident, le loueur ou l’usager ?
Introduction : le succès des trottinettes électriques partagées… et les accidents qui se multiplient
Depuis 2018, les trottinettes électriques en libre-service (ou free-floating) se sont imposées dans de nombreuses villes françaises : Paris (jusqu’à l’interdiction de 2023), Lyon, Marseille, Bordeaux… Des opérateurs comme Lime, Dott ou Tier ont mis à disposition des milliers d’engins accessibles via une simple application.
Pratiques, rapides et relativement abordables, elles séduisent étudiants, touristes et citadins pressés. Mais avec l’essor de ce mode de transport, les accidents impliquant des trottinettes se sont multipliés : collisions avec voitures, chutes isolées, blessés piétons… Et à chaque fois une question revient : qui indemnise ? Le loueur (Lime, Dott…) ou l’utilisateur qui conduit la trottinette ?
1) La trottinette électrique : un véhicule soumis au Code de la route
Depuis 2019, la trottinette électrique est reconnue comme un “engin de déplacement personnel motorisé” (EDPM) par le Code de la route. Cela implique :
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vitesse limitée à 25 km/h,
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interdiction de circuler sur trottoirs (sauf exceptions locales),
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obligation de rouler sur pistes cyclables (ou sur routes ≤ 50 km/h),
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âge minimum : 12 ans,
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obligation d’assurance responsabilité civile.
👉 Conséquence directe : en cas d’accident, on applique les mêmes principes d’indemnisation que pour tout véhicule terrestre à moteur (loi Badinter de 1985).
2) Accident impliquant une trottinette en free-floating : acteurs en présence
Trois “pôles” de responsabilité peuvent être concernés :
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Le loueur (Lime, Dott, Tier…)
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Propriétaire de la trottinette.
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Responsable de sa mise en circulation : état de l’engin, entretien, conformité technique.
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Dispose généralement d’une assurance couvrant les dommages causés aux tiers par un usager identifié.
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L’usager (conducteur de la trottinette)
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Responsable de son comportement au guidon : respect du Code de la route, prudence.
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Engage sa responsabilité civile personnelle en cas de faute (ex. : il percute un piéton).
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Les tiers (piétons, automobilistes, cyclistes…)
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Peuvent être victimes d’un accident impliquant la trottinette.
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Peuvent aussi être responsables (ex. : voiture qui percute une trottinette en piste cyclable).
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3) Cas pratiques : qui paie quoi ?
a) L’usager chute seul (sans tiers impliqué)
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Exemple : perte de contrôle sur pavés mouillés, freinage brusque.
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Conséquences :
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L’usager est seul responsable de ses blessures.
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Il ne peut pas réclamer d’indemnisation au loueur, sauf défaut technique de la trottinette.
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Ses frais sont couverts par sa mutuelle, sa GAV (garantie accident de la vie) ou une garantie conducteur EDPM s’il en a souscrite une.
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b) L’usager percute un piéton
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Exemple : un conducteur de trottinette renverse un piéton en traversant au feu rouge.
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Responsabilité : c’est l’usager qui est fautif.
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Indemnisation :
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Le piéton est indemnisé (loi Badinter).
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L’assurance souscrite par Lime/Dott au bénéfice de l’usager prend en charge l’indemnisation.
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Si aucune couverture n’existe (cas rare, mais possible hors grandes plateformes), la RC personnelle de l’usager peut être mobilisée.
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c) Un automobiliste percute la trottinette
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Exemple : une voiture coupe la priorité à une trottinette en piste cyclable.
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Responsabilité : l’automobiliste est fautif.
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Indemnisation :
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L’usager blessé est indemnisé par l’assurance de la voiture.
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La trottinette (bien du loueur) est réparée/remboursée par ce même assureur.
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d) Défaillance technique de la trottinette
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Exemple : frein défectueux, batterie qui coupe brutalement.
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Responsabilité : le loueur est fautif, car il doit mettre à disposition un engin en état de fonctionnement.
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Indemnisation :
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L’usager ou les victimes tierces peuvent demander réparation à l’assureur du loueur.
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Le loueur peut être poursuivi pour manquement à son obligation de sécurité.
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4) La responsabilité du loueur : jusqu’où va-t-elle ?
Le loueur doit :
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fournir une trottinette en état de marche,
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assurer un entretien régulier (freins, roues, batterie),
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vérifier la conformité légale (limitation de vitesse à 25 km/h, feux, réflecteurs, etc.),
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informer clairement l’usager de ses obligations légales (casque recommandé, règles de circulation).
En cas de défaut, sa responsabilité est engagée sur le fondement de la responsabilité du fait des choses (art. 1242 C. civ.) ou du contrat de location.
5) La responsabilité de l’usager : quand est-elle retenue ?
L’usager engage sa responsabilité s’il :
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roule à contresens ou sur trottoir,
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circule à plusieurs sur une trottinette,
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ne respecte pas les feux et priorités,
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conduit sous alcool ou stupéfiants,
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ne fait pas preuve de vigilance (usage du téléphone, écouteurs…).
En cas de faute avérée, il peut être condamné à indemniser la victime. Heureusement, les plateformes incluent le plus souvent une assurance responsabilité civile circulation couvrant ces cas, mais certaines exclusions existent (ex. : conduite sous alcool).
6) Assurances en jeu : qui couvre quoi ?
a) Assurance du loueur (Lime, Dott, Tier…)
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RC circulation couvrant les dommages corporels et matériels causés aux tiers par un usager.
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Attention : certaines garanties sont plafonnées ou excluent certains comportements (alcool, prêt à un tiers non inscrit).
b) Assurance de l’usager
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La RC habitation classique ne couvre pas toujours l’usage d’une trottinette motorisée (EDPM).
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Certaines mutuelles proposent une option “mobilités douces” ou “EDPM”.
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La GAV couvre les blessures de l’usager en cas de chute seule.
c) Assurance des tiers
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Exemple : un automobiliste fautif couvre les blessures de l’usager trottinette.
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Exemple : un piéton qui traverse en dehors d’un passage piéton peut voir sa faute réduisant son indemnisation.
7) Victimes : quels préjudices indemnisés ?
Comme dans tout accident de la route :
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Préjudices corporels : soins, hospitalisation, incapacité de travail, souffrances endurées, préjudice esthétique ou d’agrément, invalidité, aide humaine, etc.
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Préjudices matériels : lunettes, téléphone, sac endommagé, perte de revenus.
La loi Badinter impose une indemnisation rapide et intégrale des victimes non conductrices (piétons, cyclistes, passagers).
8) Que faire après un accident avec trottinette free-floating ?
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Sécuriser la zone et alerter les secours (15/112).
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Constat amiable si un tiers est impliqué (auto, vélo, piéton).
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Photographier la scène (trottinette, signalisation, blessures).
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Récupérer : numéro de la trottinette, référence sur l’appli, identité des témoins.
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Déclarer l’accident :
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à la plateforme (via l’app),
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à son assureur (sous 5 jours),
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au besoin : plainte si tiers en fuite.
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Consulter rapidement un médecin et conserver tous les justificatifs.
9) Litiges fréquents et recours possibles
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Loueur nie sa responsabilité : exiger expertise technique de la trottinette.
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Assureur propose indemnisation trop faible : contester, demander contre-expertise médicale.
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Exclusion de garantie : vérifier si elle est légale et opposable.
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FGAO (Fonds de Garantie) : si accident causé par un tiers non assuré ou non identifié.
Un avocat spécialisé en dommage corporel peut accompagner pour chiffrer les préjudices selon la nomenclature Dintilhac et négocier avec l’assureur.
Conclusion : une responsabilité partagée, mais un socle de protection
En résumé :
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Le loueur (Lime, Dott, Tier) est responsable de l’état de la trottinette et dispose d’une assurance RC.
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L’usager est responsable de son comportement et peut engager sa responsabilité personnelle en cas de faute.
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Les victimes tierces bénéficient d’une indemnisation rapide (loi Badinter).
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Les blessures de l’usager lui-même sont couvertes uniquement par une garantie spécifique (loueur, mutuelle, GAV).
👉 Le message clé pour l’utilisateur : toujours vérifier sa couverture d’assurance, et en cas d’accident, collecter un maximum de preuves.